La France est le premier parc de campings en Europe, et le 2e mondial. Ils représentent près de la moitié des lits marchands en France, quasiment autant que l’hôtellerie. C’est un marché en pleine croissance : en 2016, la fréquentation a augmenté de 7,5% par rapport à l’année précédente ! Ainsi, encore composé principalement d’indépendants, le marché se structure et les campings commencent à utiliser des pratiques avancées comme celle du revenue management.
Pour rappel, le revenue management est une pratique née dans l’aérien dans les années 1970 et qui consiste à avoir toujours le bon prix pour le bon client au bon moment. Cela implique d’adapter son prix en fonction de la demande prévisionnelle et du stock restant à un moment donné.
La première réponse est que, vis-à-vis du client, le sujet d’un prix qui bouge a été bien défriché par les compagnies aériennes, les hôtels ou les loueurs de voitures. Ainsi, on sait tous qu’on paiera plus cher pour un billet première classe, et qu’on aura les meilleurs prix en réservant à l’avance. Alors pourquoi pas aussi pour les campings ?
La deuxième réponse est d’ordre technique : le fait de changer les prix est rendu possible par la forte digitalisation du secteur. Le nombre de réservations sur Internet a explosé sur les sites marchands des campings, mais aussi grâce au développement des nouveaux canaux de distribution que sont les OTA (Online Travel Agencies).
Cela permet donc aux campings de dynamiser leurs tarifs.
Premièrement, beaucoup de campings affichent complet en août et en avril. Le revenue Management va ainsi servir à anticiper la demande afin de monter le prix graduellement et d’éviter d’être trop rapidement complet. Deuxièmement, au contraire, il y a beaucoup de périodes ou le camping est loin d’être rempli, et les campings sont obligés de casser les prix au dernier moment. Le revenue management va ici servir à mener une stratégie de prix et de promotions rationalisée pour augmenter le taux d’occupation. De plus, le revenue management est aussi une arme pour les campings dont la clientèle est mature et la croissance lente, et qui cherchent à booster la croissance en dynamisant leurs tarifs.
Enfin, l’augmentation de la concurrence et l’émergence des nouveaux acteurs comme les OTA obligent les campings à être de plus en plus attentifs à leur positionnement tarifaire dans la fixation de leurs prix, et de mener une véritable stratégie de gestion des canaux de vente. En effet, les OTA prennent une commission et coûtent cher aux campings, et ils ne doivent donc être activés que quand cela est nécessaire.
La première étape consiste à segmenter sa demande, c’est-à-dire regrouper ses clients selon des comportements d’achat similaires. En effet il faut bien comprendre que les clients n’ont pas tous les mêmes besoins, ni les mêmes attentes. Il faut donc apporter le bon mix prix produit pour chacun des segments clients.
Et c’est justement la deuxième étape : créer une offre qui va répondre à tout l’éventail de sa demande. C’est ce qui explique la création de classe éco, business et première classe dans les avions. On pourra ici jouer sur le découpage des lots, les services associés ou les conditions d’achat. Il faudra créer un univers des prix associés pour bien prendre en compte les effets de la saisonnalité : des prix plus élevés en période haute, et plus bas en période de creux. Il faut s’assurer en outre que cet univers des prix est cohérent à travers toute la gamme de produits et à travers tous les canaux.
Enfin, la dernière opération consiste à optimiser ses prix selon la demande prévue et la demande effective. C’est-à-dire adapter ses prix en temps réel pour adresser au mieux sa clientèle. Ici, la stratégie tarifaire du camping va permettre d’activer différents leviers d’augmentation des revenus : par exemple l’optimisation du mix durée va permettre de privilégier des durées longues en période creuse pour augmenter le taux d’occupation, ou privilégier les périodes courtes en période de pointe pour augmenter le prix moyen. Un autre levier consiste à anticiper et déclencher les campagnes promotionnelles ciblées au bon moment et à travers le bon canal.
Faire du revenue management ne signifie pas nécessairement que les clients vont payer plus cher. Ils peuvent souvent payer moins cher en commandant à l’avance ou dans les périodes creuses. Certaines plateformes de réservation envoient même des alertes pour prévenir d’une augmentation des prix imminente. Et cela permettra aussi d’avoir de la disponibilité même au dernier moment, mais cette fois à prix fort.
En fait, à l’échelle d’un secteur, adopter le revenue management permet de pousser les consommateurs à adapter leur comportement pour favoriser une demande plus lisse et plus facilement anticipable. Et cela permet aussi d’éviter une course des prix vers le bas entre les campings, qui est néfaste aussi pour les consommateurs car elle entraîne une dégradation de la qualité de l’offre et contribue à concentrer le marché en tuant les petits acteurs qui ne peuvent pas suivre.
Article Publié sur TendancesHotellerie par
Pierre HÉBRARD
CEO et co-fondateur de Pricemoov
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